Traitement mini-invasif des poches parodontales :

Association Laser Er-Yg & PRF

Dossier spécial AONews #26 - Juin 2019, Carte blanche à Renaud Petitbois, Président du 5è Congrès Euro-Implanto

Télécharger
2. ART.2 AO26 Juin 2019.pdf
Document Adobe Acrobat 4.7 MB

 La parodontite chronique est une affection d’origine bactérienne avec pour conséquences une inflammation gingivale et une résorption alvéolaire, pouvant aller jusqu’à la perte des dents (1). Son traitement a pour but premier le retrait du biofilm et du tartre sous gingival afin de retrouver une surface radiculaire biocompatible. Le moyen le plus répandu reste le surfaçage radiculaire, à la fois manuel et ultrasonique. Mais cette technique peut être améliorée par de nouveaux moyens thérapeutiques novateurs et mini-invasifs tel que les lasers.Plusieurs types sont disponibles sur le marché. Nous avons choisi d’utiliser le laser Erbium YAG (pour Erbium-doped Yttrium Aluminium Garnet). Comme tout laser, il possède des effets photo acoustiques et photoablatifs, mais il diffère par sa longueur d’onde spécifique : 2 940nm, qui est hautement absorbée dans l’eau et l’hydroxyapatite. La génération de cette onde crée une micro explosion, permettant le nettoyage des tissus, à la fois mous et durs, sans échauffement thermique (2).

Le laser Erbium YAG est utilisé en parodontologie pour ces effets sur le tartre et la décontamination

de cément, toujours sans dommages thermiques (3,4).

Cette approche mini-invasive est complétée par l’utilisation de PRF afin d’améliorer et accélérer la reconstruction osseuse. La technique PRF (Platelet Rich Fibrin) a été mise au point en 2001 par le Dr Joseph Choukroun (5).

Leprincipe est le suivant : après un prélèvement, le sang du patient est centrifugé et un caillot riche en fibrine, leucocytes et facteurs de croissance est récupéré. Ce dernier, jouant un rôle de matrice extra-cellulaire provisoire, sera appliqué sur les plaies, ou mélangé aux greffes osseuses pour permettre une accélération de l’angiogenèse et de la cicatrisation.

 Le but de cet article est de présenter l’utilisation combinée du PRF et du laser Erbium-YAG (technique proposée par le Dr Fabrice Baudot) dans le traitement des parodontites chroniques autour d’un cas clinique.

 


Présentation du cas

 

Mme H., 52 ans, se présente pour la première fois au cabinet, sur recommandations d’une amie pour une consultation concernant sa 21 qui « tombe ». La patiente ne présente aucune pathologie d’ordre général.

Cependant lors d’un bilan sanguin pré opératoire, un déficit en vitamine D a été décelé (taux de 17,3ng/mL au lieu des 30ng/mL définis comme « minimal »). Or, il est désormais reconnu que cette hormone est essentielle à un bon métabolisme osseux (6) et une réponse immunitaire efficace (7). Après examen clinique, nous constatons :

  • Une hygiène bucco dentaire correcte
  • Une inflammation gingivale localisée au secteur antérieur
  • maxillaire et à 31 et 41
  • Une parodontite chronique localisée au secteur antérieur
  • maxillaire et à 31 et 41
  • Une mobilité du type 2 des 21 et 22
  • Une égression de 3mm de la 21


Plusieurs plans de traitement ont été proposés à cette patiente par plusieurs confrères. Tous préconisent l’extraction de la 21 et son remplacement par 1 implant. Certains proposent l’extraction de tout le bloc incisivo-canin et 2 à 4 implants. En respect du gradient thérapeutique, il a été proposé à la patiente de tenter de conserver sa 21 et de traiter ses poches parodontales avec un concept de « minimal invasive periodontolgy » avec l’utilisation du PRF et du laser Erbium YAG.

 

 Traitement

 

Tout d’abord, le profil biologique de la patiente a été pris en charge.

 2 ampoules d’UVEDOSE ont été administrées à 1 semaine d’intervalle, avant le jour de l’intervention afin de remettre le statut biologique de la patiente dans un contexte favorable.

 

1 semaine avant l’intervention, un détartrage supra gingival a été réalisé. Une dose unique de cortisone a été prescrite, à prendre le matin de l’intervention (Solupred, 3 comprimés de 20 mg).

 

Le jour J, après anesthésie locale du bloc incisivo canin maxillaire et des incisives centrales mandibulaires, un surfaçage radiculaire manuel et ultrasonique est d’abord réalisé.

Puis une décontamination au laser Erbium YAG de la marque LiteTouch™ des poches parodontales a été réalisée. L’embout de la pièce à main (aussi appelé « tip ») est inseré dans les poches parodontales et le laser est mis en marche, du contact osseux vers le haut de la poche (en « touch down »), toujours en mouvement, pour ne pas endommager les tissus. Cette procédure sera répétée sur l’ensemble des poches parodontales. La décontamination de la poche est ainsi optimale.

Une fois la décontamination laser terminée, le PRF est utilisé seul (caillots découpés en petit morceaux) ou mélangé à un biomatériau allogénique (Phoenix, TBF) en « sticky bone », selon la profondeur des poches. Ces petits morceaux seront glissés et compactés dans les poches parodontales. Ces dernières sont remplies au maximum avec le PRF, qui a été mélangé à du métronidazole pur en poudre afin de réaliser une antibiothérapie « locale ». La médication

donnée en post opératoire comprends uniquement des anti-douleurs (Paracétamol 1000 mg, 3 comprimés par jour tant que douleurs).

 

Aucun lambeau ni sutures ne sont réalisés dans ce protocole, ce qui réduit drastiquement le temps opératoire, mais également les suites opératoires. Au rendez-vous de contrôle, après 2 mois un charting a été réalisé. La profondeur de poche a été visiblement réduite, avec un maximum de 4mm au sondage.

 

Dans ces poches, le laser a été repassé afin de retrouver une valeur inférieure ou égale à 3mm. La mobilité des 21 et 22 est redevenue physiologique. La gencive a retrouvé un aspect et une couleur optimale. Néanmoins, les papilles entre 11 et 21 et 21 et 22 se sont « effondrées » avec l’aggravation des « triangles noirs ».

 

Après nouveaux 2 mois de cicatrisation, l’ensemble des poches a retrouvé une valeur inférieure ou égale à 3mm. Le feu vert a donc été donné à l’orthodontiste pour débuter un traitement visant à ingresser la dent 21 et ainsi retrouvé une courbe incisive idéale et un sourire esthétique. Après le traitement orthodontique une chirurgie muccogingivale est prévue afin de traiter les récessions maxillaires.

 

Ce protocole novateur, combinant l’effet décontaminant des lasers ErYAG et l’effet angiogénique du PRF permet le traitement des poches parodontales dans un concept de « minimally invasive treatment », avec un temps opératoire réduit et des suites post opératoires minimes.

 

Bibliographie

1. Wang, Yue, Li Weiwei, Shi Li, Zhang, Fengqiu, Zheng Sun. “Comparison of clinical parameters, microbiological effects and calprotectin counts in

gingival crevicular fluid between Er: YAG laser and conventional periodontal therapiesA split-mouth, single-blinded, randomized controlled trial” Medicine: December 2017 - Volume 96 - Issue 51 - p e9367

2. Periodontology TAAO. “American Academy of Periodontology Statement on the efficacy of lasers in the non-surgical treatment of inflammatory periodontal disease”. J Periodontol 2011;82:513–4

3. (Aoki A, Miura M, Akiyama F, et al. “In vitro evaluation of Er:YAG laser scaling of subgingival calculus in comparison with ultrasonic scaling”. J Periodontal Res 2000;35:266–77

4. Folwaczny M, Aggstaller H, Mehl A, et al. “Removal of bacterial endotoxin from root surface with Er:YAG laser”. Am J Dent 2003;16:3–5.)

5. Choukroun J, Adda F, Schoeffler C, Vervelle A. « Une opportunité en paro-implantologie : le PRF » Implantodontie 2001, 55-61

6. Suda, T., Ueno, Y., Fujii, K., & Shinki, T. “Vitamin D and bone”. Journal of Cellular Biochemistry, 2003, 88(2), 259‐266.

7. Liu, P. T., Stenger, S., Li, H., Wenzel, L., Tan, BH., Krutzik, SR., Modlin, RL. “Toll-like receptor triggering of a vitamin D-mediated human antimicrobial response”. Science 2006, 311(5768), 1770‐1773.


 Retour au Dossier Carte Blanche à Renaud Petitbois - AO News #26 / Juin 2019

Retour à l'accueil