Parodontite grade C stade 4 (agressive sévère) et orthodontie

Quelles perspective ?

Dossier spécial Les Cas originaux de la rédac ! Juillet 2019 - AONews #27

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Mme C., 21 ans, bonne santé générale vient consulter pour prise en charge parodontale et forte demande esthétique. On diagnostique une parodontite agressive généralisée, (STADE 4 grade C nouvelle classification des maladies parodontales 2018, Chapple et al 2018). Parmi les patients traités en parodontie, on rapporte une prévalence de 30.03% à 55,8% de patients présentant des migrations dentaires pathologiques (Brunsvold 2005).

Face aux parodontites sévères, plusieurs options thérapeutiques sont envisageables :

- extractions multiples et compensation des édentements par une solution prothétique amovible ou fixe implantaire,

- conservation des dents avec traitements parodontal et orthodontique.

 

Un bilan parodontal complet est réalisé avant tout traitement orthodontique. Le bilan radiologique long cône et l’observation clinique permettent d’établir un diagnostic et un plan de traitement adapté à la patiente.


Prenant en considération le jeune âge de la patiente et l’absence de facteurs systémiques associés à la maladie parodontale de Mme C, non fumeuse, voici le plan de traitement choisi.

 

Sur le plan parodontal

- Thérapeutique étiologique parodontale : Détartrage/ Surfaçage en 4 séances rapprochées sous bithérapie (amoxicilline 500 1,5g/j + metronidazole 750mg/j QSP 8j (Pretzl et al 2018))

- Réévaluation 2 mois après la dernière séance de surfaçage

- Maintenances parodontales per-orthodontiques au rythme des activations.

- Renforcement du parodonte : Réalisation de deux greffes epithélio-conjonctive au niveau des canines/ première prémolaires mandibulaires

 

Sur le plan orthodontique après traitement parodontal, plan de traitement d’une durée de 2 ans établi par le Dr Françoise Fontanel

Au maxillaire :

- Extraction de 16 et 26,

- Conservation des prémolaires maxillaires très compromises uniquement pour des raisons cosmétiques, sauf incident inflammatoire en cours de traitement.

- 17 et 27 supporteront une barre palatine.

- Prémolaires maxillaires distalées pour résoudre l’encombrement antérieur.

 

A la mandibule :

- Extraction d’une incisive pour résoudre l’encombrement incisif et conserver les rapports de Classe I canine.

Lorsque le parodonte est réduit et assaini, les forces orthodontiques doivent être réduites en intensité, avec un suivi parodontal rigoureux à chaque activation, toutes les 6 à 8 semaines.

 

A la dépose des bagues :

- Les prémolaires maxillaires sont extraites. En fonction du volume osseux disponible, deux implants sont posés en 14 et 16 pour remplacer de 14-15-16 à l’aide d’un bridge sur implants.

- Trois implants sont posés en 24-25-26.

- Une contention coulée est réalisée au niveau des secteurs antérieurs à la mandibule et au maxillaire afin de maintenir les dents antérieures dans la bonne position et d’éviter les récidives.

 

Plusieurs études (Roccuzzo et al 2012, 2014) ont montré qu’il est possible de poser des implants chez les patients avec antécédent de parodontite et suivi parodontal. Cependant, le risque de complications péri-implantaires est plus élevé chez les patients avec antécédent de parodontie agressive (correspondant au grade C dans la nouvelle classification 2018 des maladies parodontales). La vigilance doit donc être plus importante dans le suivi parodontal (Swierkot K et al 2012). fig 2.

Sur le plan radiologique (Fig. 3), on note une stabilité du volume osseux et même un gain osseux dû à l’ingression des dents antérieures (Ré et al 2000). Cependant, ces mouvements doivent être réalisés avec des forces orthodontiques très contrôlées car il existe un fort risque de rhizalyses (Melsen et al, 1989).

La patiente nécessite un suivi parodontal tous les 4 mois après traitement orthodontique, afin de maintenir la stabilisation de la maladie parodontale. Le recul clinique à 10 ans montre une stabilité des résultats au long terme.

En conclusion, le traitement orthodontique est possible même en présence de pathologies parodontales sévères stabilisées afin de rester le plus conservateur possible.

Le traitement parodontal est réalisé avant de commencer l’orthodontie. Les résultats sont maintenus au long terme à condition de suivre les patients en maintenance parodontale per et post-orthodontique.

Remerciements au Dr Françoise FONTANEL qui a traité la patiente sur le plan orthodontique

 


Bibliographie :

- Chapple ILC et al, Periodontal health and gingival diseases and conditions on an intact and a reduced periodontium: Consensus report of workgroup 1 of the 2017 World Workshop on the Classification of Periodontal and Peri-Implant Diseases and Conditions. J Clin Periodontol. 2018 Jun;45 Suppl 20:S68-S77

- Brunsvold MA. Pathologic tooth migration. J Periodontol, 2005;76:859-66.

- Melsen B, Agerbaek N, Markenstam G. Intrusion of incisors in adult patient with marginal bone loss. Am J Orthod Dentofacial Orthop 1989;96:232–41

- Pretzl B, Sälzer S, Ehmke B, et al. Administration of systemic antibiotics during non-surgical periodontal therapy-a consensus report, Clin Oral Investig. 2018 Oct [Epub ahead of print]

- Ré S, Corrente G, Abundo R, Cardaropoli D. Orthodontic treatment in periodontallycompromised patients : 12-year report. Int J Periodontics Restorative Dent,

2000;20:30-9.

- Roccuzzo M, Bonino F, Aglietta M, Dalmasso P. Ten-year results of a three arms prospective cohort study on implants in periodontally compromised patients. Part 2: Clinical results. Clin Oral Implants Res 2012;23:389–95.

- Roccuzzo M, Bonino L, Dalmasso P, Aglietta M. Long-term results of a three arms prospective cohort study on implants in periodontally compromised patients: 10-year data around sandblasted and acid-etched (sla) surface. Clin Oral Implants Res 2014;25:1105–12.

- Swierkot K, Lottholz P, Flores-de-Jacoby L, Mengel R. Mucositis, periimplantitis, implant success, and survival of implants in patients with treated generalized aggressive periodontitis: 3- to 16-year results of a prospective long-term cohort study. J Periodontol 2012;83:1213–25.