La responsabilité spécifique ou partagée du parodontiste :

quel constat ?

Dossier spécial Focus sur le DU d'expertise médico-légale, Paris 7 - AONews #28 - Sept 2019

Introduction

 

La Responsabilité médicale est souvent au cœur de l'actualité avec l'affaire récente de l'anesthésiste de Besançon ou encore de la jeune Naomi Musenga. Cette dernière après plusieurs appels téléphoniques auprès des services d'Urgence est décédée. Quelle est la part de la responsabilité spécifique de l'opératrice, est-ce une négligence ? De celle de la responsabilité partagée au sein des équipes médicales pour ces deux affaires médiatiques, est-ce lié à un dysfonctionnement ou à un défaut de transmission des informations médicales ?

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5. Responsabilité spécifique et partagée
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Le parodontiste en exercice libéral travaille également avec de nombreux intervenants médicaux en fonction de l'évolution de la maladie parodontale. Quelle est la part de la responsabilité spécifique et partagée du parodontiste ?

La responsabilité médicale est l'obligation de réparer une faute, de remplir une charge, un engagement. Elle est contractuelle, individuelle et spécifique entre le patient et le parodontiste. Le traitement des maladies parodontales, c'est à dire de l'ensemble des tissus de soutien de la dent, est souvent un préalable indispensable lors de soins pluri disciplinaires complexes. La stabilisation et l'évolution des parodontites sont en relation avec l'état de santé général du patient. Ainsi, la responsabilité du parodontiste peut être également partagée (in solidum) au sein d'une équipe médicale.

Historiquement, l'émergence de la responsabilité médicale est liée à l’arrêt Mercier de la Cour de Cassation du 20 mai 1936 (Cass, Civ, 20 mai 1936, Mercier, D.P.1936.1.8) et à l’obligation de moyen. Au fil du temps et après plusieurs interrogations, il y a eu la Loi du 4 Mars 2002 (Loi n°2002-303, Loi Kouchner) qui a renforcé les obligations juridiques du praticien.

« Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir, sur l'ensemble du territoire, les traitements et les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire et le meilleur apaisement possible de la souffrance au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de traitements et de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. Ces dispositions s'appliquent sans préjudice ni de l'obligation de sécurité à laquelle est tenu tout fournisseur de produits de santé... »

Mais au-delà de ses obligations juridiques, la responsabilité médicale a avant tout une valeur éthique, d’avantage prononcée ces dernières années: « La personne malade à droit au respect de sa dignité. »

En pratique, comment articuler l'absence de reconnaissance légale de la parodontie et sa pratique clinique? Peut-on continuer à envisager la parodontie comme une spécialité à part entière ou faut-il continuer à l'enseigner avec d'autres modules chirurgicaux ? En France, avec l'évolution des connaissances, de la formation continue, le champ initial de compétences du parodontiste a tendance à s'élargir.... dès lors, il en va de même pour sa responsabilité.

 

La responsabilité spécifique du parodontiste et ses obligations juridiques

 

La faute peut être traitée en matière civile le plus souvent mais aussi en matière pénale lorsqu'une conciliation à l'amiable avec un praticien de recours a été impossible. Parfois, par voie judiciaire pénale et civile lors d'un décès d'un patient suite à une faute. La faute est le fait dommageable: « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » () La réparation d’un préjudice n’est pas seulement subordonnée à la double existence d’un dommage et d’un fait générateur de responsabilité. Le dommage doit également se rattacher au fait générateur par un lien de causalité. Il faut que le fait générateur de la responsabilité ait été la cause efficiente du dommage de manière directe et certaine.

 

L'origine de la faute revêt trois principaux aspects :

- soit un aspect technique: un diagnostic - une indication thérapeutique erronée, un aspect technique défaillant, une maladresse - une imprudence, un non-respect des règles d'asepsie...,

- soit un aspect relationnel entre le patient et le praticien: par un manquement au devoir d'information et au recueil du consentement préalablement aux soins accompagné d'une perte de confiance du patient envers son parodontiste,

- soit un aspect éthique: par un manquement d'humanisme, une atteinte à l'intégrité de la personne avec le retrait d'un organe dentaire sain (ODF), par non-respect du secret professionnel.

 

Avec la réforme de la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP) devenue la Classification Commune des Actes Médicaux (CCAM), les actes de parodontie restent des actes de préventions dont les honoraires sont pour la plupart non pris en charge par la sécurité sociale, exceptés pour les patients diabétiques. Une codification des actes de parodontie a été mise en place au sein des cabinets libéraux, elle est récente. Ses dernières modifications et applications datent du 1er Avril 2019. La maladie parodontale a une influence reconnue sur certaines pathologies générales par l'ANAES. En effet, l’évolution de la maladie parodontale peut entrainer des récidives de lésions gingivales et osseuses impliquant un suivi clinique et radiologique, une maintenance parodontale périodique pour stabiliser le parodonte. Il existe également de nombreux facteurs de risque des parodontites (d'ordre systémique, hormonale, génétique ou encore le tabac...) et le traitement parodontal est souvent long et coûteux parfois apparenté à de l'esthétisme (greffe de gencive dans les secteurs antérieurs)... Pour les traitements chirurgicaux en parodontie, les obligations juridiques de sécurité sont renforcées. L'utilisation de bio matériaux doit s'appuyer sur des publications scientifiques, des études longitudinales à long terme, consensus scientifique...De même pour les techniques chirurgicales à visée esthétique.

 

Les obligations juridiques en matière de soins en parodontie tels que le devoir d'information, le contrat de soins et le recueil du consentement devront être renforcées.

 

La responsabilité in solidum : la médecine et les traitements complexes multi disciplinaires

 

La responsabilité in solidum du latin : solidairement a juridiquement plusieurs sens. Au sein d'une collectivité, il s'agit du lien d'entraide unissant tous ses membres. Au sein d'une équipe dirigeante, communauté de vues, d'action et de destin s'unisse, au moins à l'égard des tiers, les membres du groupe. Pour les membres d'un gouvernement, il s'agit d'une obligation politique, on parlera de responsabilité collective. C'est le dernier sens qui nous intéressera d'avantage en médecine: le rapport d'obligation, le lien particulier entre le sujets passifs (débiteurs) ou actifs (créanciers) de l'obligation et de manière spécifique pénalement l'obligation pour chacun des auteurs, coauteurs et complices d'une même infraction ou d'infractions connexes de payer la totalité des dommages-intérêts et des frais, avec la possibilité de demander ensuite à chacun des autres le remboursement de ce qui a été payé pour lui.

 

Une succession ou une concordance de plusieurs fautes engendre une responsabilité in solidum lors de traitements pluri disciplinaires. « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde. » ()

 

L'équipe médicale du parodontiste (assistante, remplaçant), les protocoles techniques (utilisation de bio matériaux normé CE ou NF) sont de la responsabilité spécifique de tout professionnel de santé. La faute consiste à avoir choisi un tiers imprudemment pour aider à réaliser l'acte promis au patient, c'est la « culpa in eligendo ». Il convient de s'assurer de la compétence, de la qualification du tiers. Depuis la mise en place des recommandations de bonne pratique concernant le diagnostic et le traitement des parodontopathies, la maladie parodontale est considérée comme un facteur de risque d'autres maladies ou situations cliniques. Le diagnostic (clinique, radiologique, microbiologique et marqueurs biologiques), les moyens thérapeutiques et la stratégie de prise en charge sont également détaillées. Le parodontiste orchestrera de nombreux traitements pluridisciplinaires entre chirurgiens-dentistes, orthodontistes ou médecins : c'est la responsabilité in solidum. De cette définition, découle la notion et l'obligation de contrat entre un professionnel de santé et son patient.

 

Les principales caractéristiques du contrat de soins du parodontiste émanant du code civil et applicables pour les soins de parodontie, excepté les urgences, sont :

- être en capacité de contracter (personne majeure, responsable, non placée sous tutelle), le libre choix du professionnel de santé. Le contrat est résiliable unilatéralement lors de refus de soins ou de perte de confiance par exemple. « Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l'ordre public. » ()

- un contrat « intuitu personae », vis à vis d'une personne et le praticien exécute personnellement le contrat, les soins et le suivi thérapeutiques; l'exécution est souvent continue. « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. « Le contrat à exécution instantanée est celui dont les obligations peuvent s'exécuter en une prestation unique. Le contrat à exécution successive est celui dont les obligations d'au moins une partie s'exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps. » ()

- un contrat avec unengagement réciproque entre le parodontiste et le patient. « Le contrat est synallagmatique lorsque les contractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres. » ()

- un contrat financier avec une forte recommandation de la mise en place de devis pour les actes de parodontie de prévention, de traitement et d'esthétisme non remboursé par la sécurité sociale. « Le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit de l'autre un avantage en contrepartie de celui qu'elle procure. » ()

- un contrat tacite, implicite avec un délai de réflexion d'acceptation du devis. Un contrat consensuel avec un consentement écrit co-signé.

 

Lors de traitement pluri disciplinaires un contrat et le recueil du consentement doivent être réalisés par chaque professionnel de santé. La loi du 4 Mars 2002 a considérablement renforcé le recueil du consentement libre, éclairé du patient dans son intégrité. Le consentement a plusieurs formes : implicite, verbal, écrit. Il en sera rediscuté au chapitre suivant. L'arrêt de la Cour de Cassation du 3 novembre 2016 (6bis) est venu confirmer la règle selon laquelle la responsabilité du médecin ne peut qu'être personnelle et non pas collective. En effet, la patiente n'a pu apporter la preuve que la compresse avait été oubliée au cours de l'intervention de 2004 ou 2005. La mise en cause d'une responsabilité personnelle implique l'identification certaine du professionnel (ou de l'établissement) auquel la faute est imputable.

En médecine libéral, la faute doit être prouvée par le plaignant. La Cour de cassation justifie sa position en relevant qu’il s’agit d’une responsabilité personnelle fondée sur une négligence fautive; ce qui est différent d'une faute avec une présomption d’imputabilité. Le praticien qui adresse à un autre confrère se doit d'informer dans la limite de ses compétences le traitement complémentaire, de réaliser une analyse commune pour la mise en œuvre et la finalité de la thérapeutique parodontale choisie. Il existe également une responsabilité éthique des différents intervenants.

 

La notion de « chef » au sein d'une équipe médicale, de praticien référent.

Chaque professionnel de santé peut être amené à répondre des fautes qu’il a personnellement commises. Mais la responsabilité du médecin, ou encore celle du chirurgien-dentiste, est parfois engagée à propos d’actes qu’il n’a pas accompli lui-même, lorsqu’il est considéré comme le chef d’une équipe médicale. Sa responsabilité est liée au fait que le patient n’a pas contracté avec chacun des membres de l’équipe mais seulement avec lui et « qu’il doit répondre des personnes qu’il se substitue en dehors du consentement de son patient pour l’accomplissement d’une partie inséparable de son obligation. » ()

 

Cependant même dans le cas où le patient a contracté avec d’autres médecins de l’équipe et où il n’existe pas de lien de subordination au sein de celle-ci, le médecin peut engager sa responsabilité en l’absence de prudence et de diligence quant au domaine de compétence du praticien avec lequel il a concouru à une intervention () dans la mesure où il a ainsi manqué à ses devoirs généraux. Le médecin, comme le chirurgien-dentiste, peuvent être tenus des fautes commises par des membres du personnel de l’établissement de santé. La Cour de cassation a retenu qu’en vertu de l’indépendance professionnelle dont le médecin bénéficie dans l’exercice de son art, il répond des fautes commises au préjudice des patients par les personnes qui l’assistent lors d’un acte médical d’investigation ou de soins, alors même que ces personnes seraient les préposées de l’établissement de santé où il exerce". Ces dernières agissent en effet dans ce cas sous son contrôle direct et non plus sous le contrôle de l’établissement qui les emploie.

 

Plusieurs réflexions en matière de droit à partir de cas de responsabilité médicale in solidum peuvent être évoquées :

- la jurisprudence s'adapte progressivement à la société actuelle mais sans céder à la compassion envers les victimes, où se situe l'équité entre le patient et le praticien?

- existe-t-il un droit des laboratoires, cliniques, structures hospitalières et un autre droit du professionnel de santé en exercice libéral.... Ils sont pourtant tous soumis à la même responsabilité civile personnelle.

 

La notion de capacités, de compétences et la problématique du statut légal du parodontiste

 

La capacité est l'aptitude de quelqu'un dans un domaine précis. En chirurgie-dentaire, elle correspond au Diplôme d'Etat en chirurgie-dentaire, également à une obligation ordinale d'inscription au tableau de l'ordre et à une assurance de Responsabilité Civile Personnelle (RCP). La capacité et la compétence sont proches pour le praticien qui s'interroge sur les limites de son exercice. La capacité définit les limites de ce que le praticien est autorisé par la loi à faire. La compétence signifie pour le professionnel de santé ce qu'il peut s'autoriser lui-même à faire, en toute bonne conscience de son expérience et de son parcours. La compétence d'un professionnel de santé est liée à ses connaissances approfondies dans une matière, ce dernier est capable de bien juger par son expérience et par son savoir-faire technique. Pour le chirurgien-dentiste, l'évolution des techniques et de la science oblige à une formation continue tout au long de sa vie professionnelle. Les conférences, la lecture de revue scientifiques, la participation à des formations universitaires plutôt que commerciales permettent de maintenir ses connaissances scientifiques, de les actualiser. La compétence est le fruit à la fois de la formation initiale, de la formation continue et de l'expérience personnelle en situation clinique.

 

Au sein d'une équipe médicale pluridisciplinaire, la capacité et les compétences des différents intervenants sont essentielles. Le diagnostic, le traitement et le suivi du patient dépendent étroitement de la cohésion du projet commun de l'équipe médicale. Il convient pour chaque intervenant de connaitre ses limites, ses capacités et compétences mais aussi celles de ses confrères afin d'ajuster au mieux le plan de traitement pluri disciplinaire du patient commun. Cette obligation morale, éthique au service de la science paraît indispensable à l'évolution et au suivi des données cliniques du patient.

La confiance du patient sera maintenue également avec un renforcement de l'information entre lui et le praticien mais également au sein de toute l'équipe médicale tout le long de son suivi parodontal.

La communication et la cohésion de l'équipe médicale permettront de répondre au mieux au traitement complexe du patient et de ses différentes évolutions possibles. La responsabilité spécifique et partagée du parodontiste en sera d'autant plus épargnée.

 

La problématique de la reconnaissance du statut légal du parodontiste

La réforme des Universités a modifié le parcours des étudiants en chirurgie-dentaire. Ainsi, l'enseignement de la parodontologie a évolué. La spécialité de la parodontie, en tant que telle, peut se prévaloir de très peu de diplômes: un certificat d'étude supérieur (CES de parodontologie) permettant l'acquisition d'unité d'enseignement (UE) et des crédits européens capitalisables (ECTS). Ce CES de parodontologie (regroupé en mention médecine buccale depuis 2010) reste relativement théorique, il a une durée d'un an, est dispensé par une Université d'Odontologie et accessible à tout titulaire du diplôme de chirurgien-dentiste. Il est reconnu par le Conseil de l'Ordre national comme un Diplôme National du groupe B. ()

 

L'évolution de la spécialité de parodontie, la reconnaissance légale

Depuis 2013, seulement trois spécialités sont reconnues en Odontologie après l'obtention du concours d'internat et la validation d'un troisième cycle long: l'orthopédie dento faciale, la chirurgie orale, et la médecine buccodentaire. ()

Le troisième cycle long des études odontologiques, dénommé internat en odontologie, est accessible par un concours national aux étudiants ayant obtenu la validation du deuxième cycle des études odontologiques. Les étudiants nommés à l'issue du concours en qualité d'interne en odontologie peuvent accéder à des formations qualifiantes de troisième cycle dont la liste est fixée par les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé. Le choix de la formation et du centre hospitalier universitaire de rattachement est subordonné au rang de classement aux épreuves de l'internat. Après validation de ce troisième cycle et soutenance d'une thèse, les internes obtiennent en plus du diplôme d'Etat de docteur en chirurgie dentaire un diplôme mentionnant la qualification obtenue. A défaut d’être titulaire d’un des titres énoncés ci-dessus, les formations et l’expérience professionnelle du praticien peuvent être prises en considération par une commission de qualification dans la spécialité concernée.

 

Contrairement à l’arrêté du 19 novembre 1980 portant sur l'approbation du règlement relatif à la qualification des chirurgiens-dentistes en orthopédie dento-faciale, il n’est prévu aucun délai pour la présentation des dossiers de demande de qualification par les praticiens ne disposant pas des titres ouvrant droit directement à la qualification. Cela a pour conséquence que tout praticien, à quelque moment que ce soit de son parcours professionnel, pourra demander la qualification qu’il souhaite. Son dossier sera alors soumis à la commission de qualification concernée, qui examinera sa formation et son expérience professionnelles.

 

Par ces dernières recommandations du Conseil de l'Ordre, nous comprendrons que suivant la pratique clinique du parodontiste, ce dernier pourra demander :

- soit une spécialité en chirurgie orale (ancien DESCB), en particulier si il complète son activité en implantologie, stomatologie (extraction, comblement de sinus, reconstruction osseuse partielle),

- soit en médecine bucco-dentaire qui relève de la prise en charge des populations à risque (médicales, psychique ou technique complexe) et de la gestion des conséquences de pathologies générales sur la sphère oro-faciale.

Mais ces deux spécialités reconnues ne correspondent pas uniquement à la parodontie et demande une formation complémentaire, une ouverture du champ de compétences initial du parodontiste. Alors que cette spécialité de parodontie est enseignée au sein des différentes Universités d'Odontologie et valorisée en pratique clinique dans certains pays européens avec la formation de personnel médical telle que des hygiénistes, nous pouvons nous interroger sur l'absence de reconnaissance légale de cette discipline à part entière. L'année 2018 a également été marquée par la publication d'une classification de référence en parodontologie: la classification de Chicago qui caractérise la sévérité et la complexité des parodontites, remplace celle de l'Armitage de 1999. Cette nouvelle classification intègre les pathologies d'ordre générale (diabète, obésité, arthrose, sclérose, neutropénie...) ainsi que des facteurs de risque ayant un impact variable sur les parodontites; la parodontie "se médicalise" d'avantage avec le temps.

 

Quelles sont finalement les compétences / capacités du parodontiste, quelle est l'évolution de sa responsabilité professionnelle d'un point de vue légal et quelles sont les nouvelles orientations de la parodontie ?

 

L'expert et la parodontie

 

Les différents types d'expertise sont l'expertise amiable, l'expertise judiciaire civile ou pénale ou administrative, l'expertise de Sécurité Sociale, l'expertise pour présomption d'imputabilité des pathologies supposées d'origine professionnelle. Nous nous intéresserons aux expertises judiciaires et plus particulièrement civiles qui affectent le plus grand nombre de chirurgiens-dentistes. Le juge demande à l'expert, désigné le plus souvent à partir de la liste des experts près la cour d'appel du secteur géographique, un rapport "technique" dans le domaine médical pour l'éclairer sur le litige, les fautes, les dommages, le lien de causalité, la responsabilité, le préjudice et l'indemnisation éventuelle. Il repose sur le principe du contradictoire entre les deux parties.

 

A travers plusieurs exemples de jurisprudence, nous essaierons de mettre en lumière les obligations juridiques renforcées du parodontiste.

Conclusion

 

Les dernières lois de modernisation du système de santé (Loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 dont la version a été consolidée au 31 Mars 2018) interpellent par son titre: « rassembler les acteurs de la santé autour d'une stratégie partagée »... Elle concerne les grands axes de la politique de santé en matière de prévention, de coordination des différents professionnels de santé.

L'évolution du mode d'exercice du parodontiste, dont les actes de soins sont pour la plupart des actes de prévention de la maladie parodontale et qui sont souvent réalisés en partenariat avec un réseau de professionnels de santé, invite à s'interroger sur la continuelle évolution de sa responsabilité partagée... Le parodontiste a également intérêt à se tenir au courant des nouvelles techniques et des nouveaux matériaux afin d’avoir une connaissance pointue liée à l'évolution des données médicales et de pouvoir informer le patient d’éventuel risque lié à ces pratiques d'où l'importance de la formation continue.

 

En guise de réflexion plus générale, la parodontie, discipline à part entière enseignée, doit-elle faire l'objet d'une reconnaissance légale? Ou être regroupée vers une des trois spécialités existantes en particulier la chirurgie orale ou la médecine-bucco-dentaire en fonction de sa pratique clinique?

 

Avec l'évolution des connaissances, de la formation continue, le champ initial de compétences du parodontiste a tendance à s'élargir.... dès lors, il en va de même pour sa responsabilité spécifique et partagée.

 

Bibliographie

1. Code Civil., art. 1240
2. Code Civil., art. 1242