Les applications en hypnose

Dossier spécial HYPNOSE en dentaire

AONews #5 - Novembre 2016


Yves HALFON (Paris)

L’histoire de l’hypnose montre qu’elle est très associée à l’histoire de la médecine, notamment en psychiatrie et en anesthésie. En psychiatrie, pour comprendre l’hypnose et son intérêt clinique, deux écoles s’affrontent fin du XIXème siècle : l’école de la Salpêtrière et l’école de Nancy...

Télécharger
Les Applications en hypnose AON5 - Yves
Document Adobe Acrobat 2.7 MB


L’histoire de l’hypnose montre qu’elle est très associée à l’histoire de la médecine, notamment en psychiatrie et en anesthésie. En psychiatrie, pour comprendre l’hypnose et son intérêt clinique, deux écoles s’affrontent fin du XIXème siècle : l’école de la Salpêtrière et l’école de Nancy...

  • L’école de Paris avec Charcot pense que l’hypnose est un phénomène pathologique rendant compte de ce qu’est l’hystérie
  • l’école de Nancy avec Bernheim et Liébault qui affirment que l’hypnose, la transe hypnotique est un état naturel

Aujourd’hui, nous savons que l’hypnose utilise un mode de fonctionnement habituel de la conscience humaine. En anesthésie, l’hypnose sera utilisée comme méthode d’analgésie. Fin du XIXème aussi deux courants de recherches pour atténuer la douleur se développent : l’un est plutôt chimique(1), et l’autre psychologique : utilisation de l’éther, du chloroforme pour l’un, et de l’autre utilisation de l’hypnose (2).

 

Utilisation de l’hypnose, aujourd’hui

 

Depuis les années 2000, les recherches montrent l’intérêt de l’hypnose dans la réduction de la douleur, aussi bien sur le plan de la résonance émotionnelle que sur la sensation nociceptive. Notamment les travaux de Rainville (3) et de Faymonville (4) ont montré que l’hypnose agissait sur les mêmes structures cérébrales qui permettent à la personne de réduire et la sensation nociceptive et l’impact émotionnel. Comme le souligne D. Bouhassira (5) : « Le traitement de la douleur représente une des principales applications cliniques de l’hypnose. L’analgésie, c’est à dire la réduction de la sensibilité à la douleur est un des phénomènes hypnotiques les mieux connus ». L’hypno analgésie pendant les soins est très souvent utilisée à visée antalgique en complément des moyens médicamenteux et l’intérêt et l’efficacité de ce type de méthodes sont maintenant bien reconnus dans les milieux médicaux.

 

Préparation à la chirurgie
Une étude récente a démontré l’effet de l’hypnose sur l’anxiété pré-opératoire (6). Recherche faite sur des personnes s’apprêtant à subir des procédures de chirurgie ambulatoire. Trois groupes étudiés :

  • un groupe avec hypnose, avec la suggestion de se sentir relaxé et calme avant l’opération ;
  • un groupe faisant l’expérience d’une écoute attentive et d’un soutien apporté par un professionnel et
  • un groupe auquel l’on donne les informations habituelles.

Seul le groupe avec hypnose relate une diminution importante de leur anxiété. Alors que les deux autres groupes ont eu une augmentation de leur niveau d’anxiété. Il est devenu très courant aujourd’hui d’utiliser l’hypnose comme complément à une anesthésie locale. Cette technique permet de diminuer voire de supprimer le besoin d’une anesthésie chimique. Les tenants de cette approche décrivent également chez leurs patients un temps de récupération plus rapide, et une diminution de leurs besoins d’antidouleurs par la suite.

 

L’utilisation de l’hypnose en pédiatrie
Dans le développement cognitif de l’enfant, la fonction imaginaire est prédominante de 2 ans à 12 ans. Parallèlement, se développera le raisonnement à partir de 7ans. L’équivalent de la transe hypnotique, c’est l’enfant rêveur, le regard absent, l’esprit ailleurs. L’enfant est un très bon praticien de l’hypnose. L’hypnose a été utilisée chez les enfants durant les 40 dernières années. Ses indications concernent sur le plan pédiatrique : les affections pulmonaires, les allergies, l’urticaire, les problèmes dermatologiques variés, les maux de tête, l’énurésie, la mucoviscidose, le diabète, la dysphagie, les désordres gastro-intestinaux, les troubles des fonctions immunitaires, la douleur, le cancer, les soins palliatifs (7).


L’hypnose avec le mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’Azotem (MEOPA)
L’utilisation de techniques hypnotiques associées au MEOPA s’élargit. Un film fait par S. Leruth et B. Minguet disponible à l’Association Sparadrap montre comment le soignant peut associer les techniques hypnotiques à ce produit, et réduire l’anxiété qui peut naître chez certains enfants, lorsque l’on utilise le Méopa seul8. Hypnose et Méopa ou hypnose seule sont utilisés pour un grand nombre d’interventions chez l’enfant. Les indications sont assez larges : ponctions lombaires, AMO, biopsies rénales, gestes algiques, retrait de drains, ponctions veineuses sur des enfants phobiques ou anxieux, réduction de luxation d’épaule, fractures, sutures, endoscopies gastriques, kinésithérapie précoce sur des sites multifocales en chirurgie orthopédique et soins dentaires.

 

L’utilisation de l’hypnose dans un service de grands brûlés

L’hypnose peut profiter aux patients brûlés et diminuer leur consommation de médicaments analgésiques.
Des traitements analgésiques puissants tels que la morphine sont généralement prescrits aux patients brûlés graves pour les aider à faire face à des accès de douleur aiguë. Cependant, des doses trop importantes augmentent le risque d’effets secondaires négatifs. Et c’est pourquoi, l’utilisation de l’hypnose montre tout son intérêt.
Dans une étude avec des patients atteints de brûlures majeures admis dans une unité de soins intensifs de l’hôpital universitaire de Lausanne les résultats de cette recherche ont montré que les patients qui ont eu de l’hypnose en plus du traitement conventionnel ont signalé des scores de douleurs moindres et une anxiété moindre que les patients qui recevaient uniquement le traitement standard.
Dans de nombreuses équipes, aujourd’hui l’hypnose sera utilisé pour réduire les effets douloureux des soins notamment changer les pansements.

 

Hypnose et obstétrique
Même si le vécu des accouchement se soit nettement amélioré grâce à la péridurale, l’utilisation de l’hypnose revient dans les services d’obstétrique non seulement pour gérer l’angoisse et la douleur de l’accouchement. Mais aussi dans un certain nombre d’applications médicales : menace d’accouchement prématuré, nausées, vomissements....

En plus de l’accompagnement psychologique et médical, des techniques hypnotiques sont utilisées. Il en est de même pour les traitements d’infertilité où la composante psychologique et émotionnelle est importante (9).
L’intérêt de l’hypnose en obstétrique par rapport à d’autres formes d’aide comme des techniques de respiration, la relaxation, fut démontrée par une recherche qui les comparait. Il en ressort que les femmes avec l’hypnose eurent un travail beaucoup plus court, utilisèrent moins de traitements anti-douleurs (10)…

 

Hypnose et traitements de la douleur chronique
La douleur chronique est un enfermement hypnotique quasiment de la personne, et l’on comprend que parmi les approches thérapeutiques, l’hypnose est une possibilité de libérer le patient de cette douleur/enfermement, de cette douleur/ captation. Dans des centres de traitement de la douleur, Il est habituel d’ajouter au traitement médical de la douleur l’hypnose, toujours pour réduire la douleur, l’anxiété que cela entraîne et redonner du contrôle sur leur corps. Cela demande de la part des patients une motivation d’utiliser une approche autre qu’un traitement médical, et un apprentissage de cette façon de gérer leur douleur. Le patient, en hypnose va travailler non seulement sur ses sensations qu’il pourra peu à peu modifier, mais aussi travailler sur son vécu émotionnel et ses aspects cognitifs vis-à-vis de sa pathologie douloureuse et de ses éventuelles conséquences. Une telle approche permet au patient de réduire sa douleur et d’améliorer sa qualité de vie. L’hypnose est proposée pour des patients atteints de fibromyalgies, de migraines, etc...
Une étude a démontré que des patients migraineux ayant eu un traitement par hypnose constatèrent une diminution importante de la fréquence des migraines, voire une disparition totale. Dans la pratique les patients relatent une diminution de l’intensité douloureuse, lors d’une crise. Le schéma d’apprentissage est toujours le même : des suggestions pour réduire l’intensité douloureuse, réduire l’anxiété en mobilisant leur imagination, et l’apprentissage de l’auto-hypnose.

Hypnose en cancérologie
L’hypnose est utilisée lors de procédures invasives à visée diagnostique ou thérapeutique du cancer, toujours pour réduire la douleur, l’anxiété et autres symptômes (nausées, etc.) Ces procédures invasives sont multiples : pose de chambre implantable, pose de perfusion, prélèvements sanguins, pose de sonde naso-gastrique, biopsies, mobilisation pendant la toilette ou un examen, soins de plaies. La liste n’est pas exhaustive. Cette pratique de l’hypnose est utilisée aussi dans les douleurs chroniques dues à la tumeur cancéreuse ou aux thérapeutiques du cancer : chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie.
Charcot écrivait en 1881 : « Entre le fonctionnement régulier de l’organisme et les troubles spontanés qu’y apporte la maladie, l’hypnotisme devient une voie ouverte à l’expérimentation... aussi bien pour le physiologiste et psychologue que le médecin » (11). Les recherches aujourd’hui sur l’hypnose confortent la pratique clinique : l’hypnose démontre son efficacité dans bien des domaines de la médecine, de la dentisterie pour la prise en charge de la douleur et de l’anxiété, pour le mieux-être du patient.