AONew. Comment vous présenteriez vous ?!
Marwan Daas. Docteur Marwan Daas, j’ai un exercice mixte, libéral et Maître de conférences à temps partiel à l’Université Paris Cité. Passionné par notre beau métier de chirurgien-dentiste et la transmission de savoir, je m’efforce d’allier pratique, pédagogie et recherche pour améliorer la prise en charge des patients et former les professionnels de demain.
AON. Pourriez-vous nous résumer votre parcours? Avez-vous eu des mentors et que vous ont-ils apporté ?
M.D. Je vais essayer de faire court !
J’ai eu deux mentors, Michel Postaire et Jean Marie Rignon-Bret, qui m’ont transmis la rigueur dans notre pratique et l’approche globale dans nos traitements. Je peux dire que j’ai eu de la chance d’avoir côtoyé de bons cliniciens et enseignants hors pair qui sont devenus des amis.
AON. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous tourner vers l’implantologie et l’esthétique?
M.D. Je dirais en premier l’esthétique car par définition nous avons un exercice qui est de l’art dentaire. J’ai commencé très tôt à traiter des patients qui nécessitaient des réhabilitations plurales, complètes et complexes (et généralement présentant un handicap social et psychologique).
En leur rendant leur sourire avec une esthétique personnalisée, ils retrouvaient goût à la vie avec un nouveau départ.
Quant à l’implantologie, très rapidement je l’ai intégré dans mes plans de traitement. En effet, cette belle discipline rend un grand service avant tout à nos patients quels que soit leurs types d’édentement. Quand l'implantologie est utilisée comme un moyen et non un objectif, elle permet une réhabilitation prothétique non mutilante et surtout d’offrir à nos patients une « 3ème dentition ».
AON. Utilisez-vous l’empreinte optique au quotidien? Y a-t-il des cas où, selon vous, c’est systématiquement plus performant qu’une empreinte conventionnelle ou inversement ?
M.D. Le flux numérique est devenu un outil incontournable dans notre pratique mais je dis bien un outil. L’empreinte optique nous permet aujourd’hui dans certaines situations cliniques d’être aussi précis qu’avec nos empreintes conventionnelles. Il est évident que chaque outil a ses indications et ses limites. Dans mon exercice j’utilise systématiquement l’empreinte optique pour les restaurations partielles (inlay, onlay et overlay), les couronnes périphériques avec une limite cervicale visible à l’œil nue et en implantologie pour 1 ou 2 implants maximum. Pour les facettes et à partir de 3 implants je reste conventionnel car l’empreinte optique lisse les préparations a minima et en implantologie, dans les cas d’endentements pluraux (à partir de 3 implants) et complets, elle n’est pas assez précise et reproductible. Mais, la technologie évolue vite, je pense que ça viendra et je serai très content de pouvoir utiliser l’empreinte optique dans toutes les situations cliniques.
AON. Quelle est selon vous la plus grosse innovation en dentisterie esthétique de ces dix dernières années ?
M.D. Je dirais quand même les outils numériques pour améliorer la communication avec les patients et les prothésistes, et avoir plus de prévisibilité. Le fait de pouvoir imaginer le résultat, avant même de commencer le traitement, de le montrer au patient puis ensuite de le personnaliser nous permet aujourd’hui d'être prévisible. Mais attention ce n’est pas pour autant plus simple car le numérique ne posera pas forcement les bonnes indications et le praticien doit rester le chef d’orchestre du traitement. La difficulté de notre exercice ce n’est pas la technique mais plutôt de poser la bonne indication.
AON. Vous partagez votre temps entre une activité hospitalière, privée et des conférences ici ou là, mais comment organisez-vous votre temps ?!
M.D. Pour faire tout ça il faut être effectivement épanoui et faire !du sport pour s’entretenir ! On a un super métier mais super prenant.
Je suis à mon cabinet 2-3 jours par semaine et mon activité hospitalo-universitaire 2 jours. J’adore enseigner, communiquer et transmettre. C’est une passion pour moi, je pourrais ne faire que des conférences ! Mais pour partager le savoir il faut avoir un exercice libéral sinon on n’est pas crédible et j’ai justement cette chance d’être Maître de conférences à temps partiel.
Enfin je prends comme tout le monde des vacances et là je coupe complètement pour profiter de ma famille.
AON. Comment voyez-vous l’avenir de la dentisterie en France, pensez-vous que l’intelligence artificielle et la robotisation vont changer la donne ?
M.D. Je suis de nature optimiste mais aussi réaliste : la dentisterie en France peut encore avoir de beaux jours. Pour cela il faut viser l’excellence et continuer à s’épanouir dans tout ce qu’on fait quel que soit la discipline. Pour cela il faut continuer à se former car notre profession évolue en permanence avec des nouvelles technologies.
L’intelligence artificielle (IA) et la robotisation sont des outils qui ne me font pas peur. Au contraire, ils peuvent nous aider en améliorant la précision des diagnostics, la planification des traitements et l’exécution des actes. L’IA par exemple permet l’analyse automatique d’images médicales (radiographies, scanners) pour détecter les pathologies avec une grande fiabilité. Elle optimise aussi la conception des prothèses et implants via des logiciels de planification assistée. La robotisation, quant à elle, apporte une aide précieuse lors des interventions chirurgicales, notamment en implantologie, en guidant les gestes du praticien pour une précision accrue et une sécurité renforcée. Ces avancées réduisent donc les erreurs, améliorent l’efficacité des soins et optimisent la thérapeutique.
AON. Recommanderiez-vous un livre ou une formation aux praticiens souhaitant approfondir leurs connaissances en prothèse sur implant?
M.D. C’est toujours difficile de parler de soi même mais si je peux vous conseiller une formation de prothèses sur implant c’est la mienne 😊 !
En fait, notre consœur Anne-Laure Simon m’a demandé d’intégrer le groupe GRF avec JP Attal et Gil Tirlet pour faire une formation de prothèses sur implant. C’est une formation en cinq modules, au total dix journées, de la planification implantaire à la conception prothétique unitaire, partielle et complète avec une journée spéciale Prothèse Amovible Complète conventionnelle. On a commencé en 2019, les commentaires sont toujours très bons et très encourageants. J’adore ce format de cours avec une quarantaine de participants où on peut échanger et discuter de diverses situations cliniques avec un recul clinique de plus de 25 ans dans ce domaine.
Je tiens ici à remercier encore à Anne-Laure pour sa confiance.
Pour les ouvrages je peux vous conseiller mon dernier livre sur les traitements prothétiques et implantaires de l’édenté total 2.0, édition Quintessence Internationale, qui est paru en 2024. C’est une bible car il couvre toutes les facettes de traitement de l’édenté complet. Et si vous en voulez un sur l’unitaire et partiel il faudra patienter un peu, ça va être pour très bientôt … à l’ADF prochain !
AON. Si vous aviez la possibilité de changer quelque chose à votre parcours le feriez-vous et qu’est-ce que ça serait ?
M.D. Je dirai … rien ! J’ai eu un parcours un peu atypique car je suis arrivé en France à l’âge de 18 ans pour faire mes études, avec un début un peu difficile, mais ma détermination, l’envie de réussir et ne rien lâcher m’ont permis d’avoir un parcours honorable. Comme je l’ai dit dans mon discours officiel d’intronisation à la présidence de de l’Académie Nationale de Chirurgie Dentaire, je remercie notre beau pays la France qui m’a accueilli et m’a permis de grandir et de devenir l’homme que je suis aujourd’hui.
AON. Justement, pour terminer cet entretien, vous êtes président de l’Académie Dentaire pour 2025. En quoi consiste votre rôle et à quoi sert cette institution ?
M.D. C’est vraiment un honneur pour moi d’être le Président de l’Académie Nationale de Chirurgie Dentaire qui est la plus haute autorité scientifique professionnelle. Son action apparaît dans les travaux de ses Commissions, dans sa participation au Comité national odontologique d’éthique, dans ses séances de travail et ses séances solennelles et officielles. Elle répond aussi à l’attente des pouvoirs publics et à celle des organismes professionnels. L’Académie Nationale de Chirurgie Dentaire se veut être ainsi au service des praticiens, et principalement à celui de la Santé publique. Elle contribue donc à la recherche, l’enseignement et la diffusion des connaissances en chirurgie dentaire, tout en jouant un rôle de conseil auprès des pouvoirs publics.
Mon objectif pendant cette année de présidence sera donc d’intensifier la collaboration avec tous les acteurs de la profession comme notre Conseil National de l’Ordre, l’Association Dentaire Française et toutes les institutions qui œuvrent pour la défense et la promotion de notre profession. Ce travail en réseau avec nos partenaires est indispensable pour garantir à nos jeunes professionnels un avenir plein de promesses et pour nos patients une meilleure prise en charge.
Je voudrais finir cet interview en remerciant toute l’équipe de rédaction de la revue AONEWS et vous dire Bravo !